« Ethique des relations homme/animal »
« Pour une juste mesure »
L’homme et l’animal => Chaque début d’année, nous vous proposons un article qui dépasse notre strict cadre sanitaire. La place des animaux dans les sociétés humaines ou le bienfondé de la consommation de viande font l’objet de débats parfois passionnels.
Un groupe de travail de l’Académie d’Agriculture de France, avec des membres de l’Académie vétérinaire (22 scientifiques et professionnels avec une sensibilité différente à l’égard de la question animale), a travaillé pendant plus de 4 ans sur l’éthique des relations homme-animal. Il en est ressorti un livre : « Ethique des relations homme-animal : pour une juste mesure ». Sont présentés ici les principaux éléments abordés dans cette publication.
Quelques présupposés
Le mot « animal » ne veut rien dire mais il est commode et inclut les seuls animaux vis-à-vis desquels l’homme se sent ou accepte de se reconnaître responsable. Il a été exclu de se focaliser sur le seul animal pour traiter des questions éthiques le concernant car les risques d’anthropomorphisation de l’analyse et de radicalisation des conclusions sont alors trop importants. Il est indispensable d’intégrer l’éthique animale à l’ensemble plus vaste des relations homme-animal, afin de tenir compte, sans néanmoins vouloir en exagérer l’importance, des contraintes que peut subir l’homme. Les réflexions ont été fondées sur les connaissances scientifiques pour asseoir l’argumentation.
Que sont les animaux ?
C’est de la distance entre l’homme et l’animal dont il est question. Aucune définition ne s’impose et une part de subjectivité intervient dans la réponse. Seule s’impose la reconnaissance d’une évidente sensibilité qui, contrairement à une opinion trop souvent exprimée, n’a jamais, sauf exception, été niée. Ne pas être d’accord sur les aspects biologiques, philosophiques, religieux, juridiques ne doit normalement pas interdire le dialogue et la définition d’un code de bonne conduite à l’égard des animaux.
L’élevage, ses acteurs et la société
L’élevage a connu des modifications radicales depuis 1950 et s’est accompagné d’une baisse du pouvoir décisionnel des éleveurs. Il demeure un secteur socioéconomique très important. Le point de vue des acteurs du débat (« protectionnistes », éleveurs et organisations professionnelles, consommateurs, législateur…) est longuement analysé. Les protectionnistes sont une nébuleuse de tendances diverses, les plus radicaux (abolitionnistes) n’étant pas les plus nombreux mais sachant faire parler d’eux et disposant d’importants moyens financiers. Les protecteurs des animaux ont eu le mérite d’être les premiers à sensibiliser l’opinion publique à la question animale.
L‘analyse des composantes du débat
L’évidence de la légitimité de l’élevage est d’abord rappelée. Il est ensuite question des conditions de vie des animaux, traduite avec l’expression « bien-être animal ». Il en existe de nombreuses définitions. Au minimum, c’est le maintien d’un niveau de production suffisant signifiant que les animaux sont entretenus dans des conditions satisfaisantes. Pour aller plus loin, c’est la définition de la santé selon l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) : état complet de bien-être physique, mental et social. A ce niveau, se situe notamment le respect des cinq libertés : absence de faim et de soif, confort physique, bonne santé physique et absence de blessures et de douleur, possibilité d’exprimer le comportement normal de l’espèce, absence de peur et de détresse. L’évaluation des conditions de vie des animaux requiert une approche pluridisciplinaire dans laquelle l’éthologie tient une place importante. Pour les problèmes existants, les éleveurs ont à apporter des solutions avec une approche au cas par cas.
Les possibilités d’une réponse éthique
Les demandes des acteurs du débat sont à prendre en compte : tous souhaitent améliorer le bien-être, mais quelles en sont les limites ? Par ailleurs, tous les consommateurs ne sont pas prêts à payer plus cher des denrées alimentaires pour des raisons de bien-être animal. Il est intéressant de faire jouer l’éthique de responsabilité et l’éthique de conviction. La première débouche sur l’idée de mesures correctrices obligatoires, dans la limite des possibilités économiques conjoncturelles, mais avec un objectif clairement exprimé de les corriger le plus tôt possible. L’éthique de conviction permet à chacun, individuellement, d’aller plus loin. Le végétarisme, le végétalisme et le véganisme ne sauraient être considérés comme des solutions pour améliorer le bien-être des animaux : ce sont des engagements individuels qui reposent sur des idées très contestables sur le fond et susceptibles en théorie de conduire à la disparition de l’élevage et des éleveurs.
Pour les éleveurs, redevenir les principaux acteurs du débat
Il est nécessaire que les éleveurs s’efforcent de redevenir les principaux acteurs du débat. Par leur contact quotidien avec les animaux, ils sont en effet les mieux placés pour parler des conditions de vie qui conviennent à ces derniers. A l’écoute des demandes sociétales, ils doivent être force de proposition pour transformer les contraintes règlementaires en opportunités. Des exemples existent où le consommateur a la possibilité d’encourager le respect du bien-être animal.
Un compromis éthique pour l’expérimentation animale
Parce que l’expérimentation animale est, dans nombre de cas, la seule démarche permettant d’aboutir à des preuves validées, il est souvent impossible de renoncer à l’utiliser aujourd’hui. La règle dite des 3R (Remplacer, Réduire, Raffiner) fournit les bases d’un compromis éthique, consensuel et évolutif, à l’égard des animaux d’expérience.
Le bien-être des animaux familiers
Les questions relatives à l’élevage des animaux familiers (animaux de compagnie (chien, chat…) ou élevés dans la compagnie de l’homme (canaris, poissons rouges…)) se rapprochent de celles qui se posent pour les animaux de rente mais la simple détention d’un animal de compagnie est également concernée. Le bien-être qui est offert à ce dernier, la question du lien parfois excessif entre l’homme et l’animal, les limites à fixer aux soins vétérinaires (jusqu’où aller ?) sont autant de thèmes qui ont été évoqués.
Les fondamentaux de l’« éthique des relations homme-animal »
La conclusion rappelle les fondamentaux de l’« éthique des relations homme-animal ». L’éleveur aime ses animaux et sait que ce sont des êtres sensibles. Les comportements déviants sont à contester, les maltraitances à punir, les mauvaises pratiques à corriger… Mais, il est essentiel que notre société comprenne l’intérêt de l’élevage, soutienne les éleveurs et leur travail voué à la nourrir, à entretenir le territoire, à façonner nos paysages… ce qui participe à notre richesse collective. Cela implique notre mobilisation pour argumenter, ce livre apporte des éléments, je vous invite donc fortement à le lire. En ce début 2020, le Président et le Conseil d’Administration de GDS Creuse, les équipes GDS Creuse et Farago Creuse se joignent à moi pour vous présenter tous nos meilleurs vœux pour cette nouvelle année.
Chaque début d’année, nous vous proposons un article qui dépasse notre strict cadre sanitaire. Dans la lignée de celui du 13/01/2012 : « Agriculture, alimentation, environnement et santé humaine, les agriculteurs doivent reprendre la parole », ces articles (toujours disponibles sur notre site) ont pour objectif de vous apporter des arguments rationnels face aux slogans et faux jugements que le monde agricole subit. Dans cette optique, notre prochain article abordera les conséquences des régimes sans viande.