Affections respiratoires bovines
Plan d’action en élevage
Journée GDS Creuse/GTV 23 => Pour la 16ème journée annuelle, l’ensemble des vétérinaires intervenant sur le département de la Creuse était invité à s’informer sur « les affections respiratoires des bovins : le plan d’action en élevage ».
Dans un objectif d’approche collective du troupeau, depuis 2000, des outils ont été construits, mis à disposition et présentés lors des journées annuelles GTV23/GDS Creuse. Pour 2015, c’est le plan d’action vis à vis des maladies respiratoires qui a été abordé. Il peut se décomposer en 3 phases.
Une phase immédiate de traitement des animaux…
La thérapeutique antibiotique des bovins malades est obligatoire lors d’affections respiratoires, tant le risque de surinfection ou d’infection primitive par des bactéries pneumopatho¬gènes est élevé, vu la fréquence du portage asymptomatique dans les voies respiratoires hautes et le risque de contamination notamment lors de mise en lots. Le but du traitement antibiotique est d’arriver à l’éradication de la bactérie responsable (« guérison bactériologique »). Celle-ci est le plus souvent une des pasteurelles : Mannheimia haemolytica, Pasteurella multocida, Histophilus somni. Outre les pasteurelles, Mycoplasma bovis est régulièrement rencontré. Quatre axes vont orienter votre vétérinaire dans sa prescription : l’antibiotique (fonction du spectre, de la diffusion pulmonaire, des traitements déjà effectués et des analyses), le schéma posologique (voie, dose et rythme d’administration, durée du traitement, temps d’attente), les contraintes de réalisation du traitement et les thérapeutiques adjuvantes, notamment les anti-inflammatoires.
… avec l’importance de la précocité d’intervention…
La précocité d’intervention va conditionner le taux de réussite. En début de maladie, la vasodilatation favorise le passage de nombreuses molécules par rapport à un poumon sain. Les stades ultérieurs de la maladie diminuent l’accessibilité du foyer infectieux aux antibiotiques. Si la 1ère intervention est précoce, les résultats cliniques et bactériologiques sont excellents et proches de ceux obtenus en essais contrôlés par les laboratoires pharmaceutiques. Lors de d’intervention retardée ou en 2nde intention, le taux de réussite est dans les meilleurs cas de 50 % et, fréquemment après une phase de rémission, le bovin rechute, perd du poids et devient une non-valeur économique.
… et la détermination des animaux à traiter
Ensuite, les animaux à traiter sont à déterminer : les seuls malades (urgence), le groupe incluant les malades (métaphylaxie) ou l’ensemble du groupe (antibioprophylaxie).
L’antibioprophylaxie doit être exceptionnelle et se limiter aux seuls cas d’allotement d’animaux destinés à être engraissés et après une approche raisonnée. La métaphylaxie a pour objectifs de réduire la morbidité et la létalité, de diminuer le temps de soins et de diminuer les coûts thérapeutiques. Elle est à initier quand le nombre d’animaux malades est soit de 10 % plus de deux jours consécutivement, soit de 25 % de façon instantanée. Une autre façon de l’envisager est de prendre les températures rectales des animaux, le seuil d’intervention étant fixé à 40°C sur 10 ou 20 % des animaux.
Une phase de recherche des agents infectieux responsables,
Les agents pathogènes responsables sont bien connus. Leur identification est utile pour changer un traitement ou mettre en place une prophylaxie vaccinale. Pour les jeunes animaux, on pensera essentiellement à une pneumonie virale, au premier rang figurant le virus respiratoire syncytial bovin (RS) et secondairement le virus parainfluenza III (PI3), pour les animaux sevrés une pneumonie « mixte », virale et pasteurellique (RS et M. haemolytica), ou virale et « mycopias¬mique », ou selon la date de l’allotement, on n’oubliera pas la bronchite vermineuse (Dictyocaulus viviparus). La phase d’examen clinique est obligatoire pour s’assurer que les manifestations cliniques respiratoires ne masquent pas d’autres troubles, établir le degré de l’atteinte collective et choisir les animaux sur lesquels sera envisagé le diagnostic de laboratoire. La priorité sera donnée aux techniques d’investigation destinées à l’identification directe des agents pathogènes. Du vivant de l’animal, la plus aisée est l’écouvillonnage nasal profond (ENPP). Les animaux choisis devront être en début d’évolution. Post mortem, les limites des prélèvements sont doubles : le ou les animaux morts doivent être représentatifs de l’affection du troupeau et les cas chroniques sont beaucoup moins exploitables que les cas aigus : on ne trouvera pas de virus et on trouvera trop souvent des bactéries pyogènes.
Une phase de prévention et de prise en compte des facteurs de risque, pour l’année et/ou les lots de bovins suivants
La visite d’élevage est le complément indispensable pour une prévention collective, notamment face à un épisode de gravité exceptionnelle ou lors de récidive ou de récurrence. La visite bâtiment (cf. prochain article) se double d’une visite plus globale s’intéressant aux flux d’animaux (allotissements, regroupements, achats…), aux plans d’alimentation (de la prise colostrale au sevrage et aux transitions alimentaires) et à la gestion de la santé dans l’élevage. Cette visite permet d’identifier les facteurs de risque propres à l’élevage, l’étape suivant étant de proposer des mesures correctives réalisables, en nombre réduit, avec un ordre de priorité.
La vaccination, un outil à utiliser de manière réfléchie
Les éléments prophylactiques peuvent être déduits des résultats analytiques ou être appliqués systématiquement, comme la vaccination contre le virus respiratoire syncytial (RS). La vaccination se fait idéalement avant la période à risque (automne, hiver), avant l’allotement, ou au fur et à mesure des naissances. Dans ce dernier cas, les perturbations de l’efficacité vaccinale dues aux anticorps colostraux impliquent une répétition des doses vaccinales ou l’usage d’une spécialité par voie intranasale (à partir de 3 semaines). Dans le cas de jeunes bovins conduits en lots, la primovaccination, si elle débute le jour de l’arrivée des animaux ne peut être efficace que si la prise vaccinale est effective alors que le virus circule dans les lots d’animaux (c’est une sorte de « course de vitesse »). En conditions contrôlées, la vaccination des mères, dans le but d’enrichir le colostrum, apporte une protection clinique significative mais partielle. Les vaccins antibactériens disponibles sont dirigés contre les pasteurelles, essentiellement Mannheimia haemolytica. La nécessité d’une vaccination contre Pasteurella multocida, de plus en plus fréquemment isolée, voire plus fréquemment isolée que M. haemolytica, ne fait pas l’unanimité, surtout en l’absence d’un vaccin moderne efficace.
Bilan et maîtrise des facteurs de risque, maillons indispensables au contrôle des maladies respiratoires
1ère étape de notre « Le sanitaire… j’adhère ! », chaque année, un bilan sera effectué, notamment pour quantifier les maladies respiratoires qui interviennent de manière récurente (formes endémiques). Si la présence est significative (taux de malades > 15 %), il sera alors mis en place la 2ème étape de notre « Le sanitaire… j’adhère ! » : la recherche et la maîtrise des facteurs de risque, phase indispensable du contrôle des maladies respiratoires qui ne peut se réduire à la prescription du duo antibiotiques-vaccins.
Didier GUERIN
GDS Creuse
La semaine prochaine : La visite bâtiment