Omphalites du veau – 06 décembre 2023

Omphalites du veau
Un challenge thérapeutique et des mesures de prévention limitées

 

Omphalites du veau : Après les diarrhées néonatales et les pathologies respiratoires, c’est la 3e cause de pathologie chez le veau, avec une prévalence et des conséquences importantes dans certains élevages.

Lors de la 24e journée GTV – GDS du 09 novembre 2023, les vétérinaires ont échangé sur la problématique des omphalites et sur les mesures à mettre en œuvre dans les élevages. L’incidence de cette affection de l’ombilic est variable, de 1 à 14 % des veaux étant touchés.

Le cordon ombilical, une structure anatomique à connaitre…

Le cordon ombilical fait le lien entre le fœtus et le placenta fixé à l’utérus de la mère. Il se compose de deux artères, d’une veine et du canal de l’ouraque. Les deux artères ombilicales prennent naissance au niveau de l’aorte du veau et drainent le sang riche en dioxyde de carbone et en déchets fœtaux. La veine ombilicale atteint le foie en se divisant en deux parties : l’une s’anastomose à la veine porte et l’autre à la partie hépatique de la veine cave caudale. Le système veineux ombilical permet l’apport de sang oxygéné et de nutriments au fœtus en développement. Le canal de l’ouraque prend naissance au niveau de l’apex de la vessie et permet l’élimination de l’urée et des déchets azotés. Ces quatre structures sont entourées par un tissu conjonctif muqueux, la gelée de Wharton, et par la paroi du cordon, une séreuse blanchâtre.

(Source Bohy, Chastant-Maillard)
Le cordon ombilical se compose de deux artères, d’une veine et du canal de l’ouraque, entourés par la gelée de Wharton et une paroi séreuse blanche. L’infection ou omphalite peut concerner la zone de l’anneau inguinal mais également toutes les structures internes, avec un pronostic beaucoup plus réservé.

… avec une rupture au moment du vêlage

Au moment du vêlage, l’anneau ombilical se contracte, les artères s’oblitèrent en remontant dans l’abdomen, la veine, qui n’est plus alimentée par le placenta, se dilacère sous le poids du veau et le canal de l’ouraque se rétracte sous l’effet de l’étirement. En cas de vêlage dystocique, la rupture de la paroi ombilicale se fera par traction manuelle à une dizaine de cm de la base de l’ombilic. Après le vêlage, la paroi de l’ombilic doit être sèche à 4 jours, il tombe à 2 semaines et une croûte persiste jusque l’âge de 1 mois. Dans l’abdomen, vers 3 – 4 semaines, tous les vestiges sont confondus avec les tissus conjonctifs qui les contiennent.

Le « gros nombril », un syndrome qui recouvre plusieurs pathologies, …

L’humidité et la présence de sang dans le cordon ombilical constituent un milieu favorable au développement des germes pendant les 48 premières heures de vie. L’environnement du veau à la naissance est souvent fortement chargé en bactéries, principalement d’origine fécale. L’omphalite se caractérise par une infection avec inflammation localisée de la région ombilicale. On distingue l’omphalite externe qui se limite à la région superficielle de l’ombilic (abcès, phlegmon) de l’omphalite interne qui peut toucher toutes les structures présentes à la naissance. On peut donc rencontrer une omphalo-phlébite (touchant la veine ombilicale), une omphalo-artérite (touchant une ou les deux artères) et une omphalo-ourachite (touchant l’ouraque), parfois associées entre elles.

… un diagnostic clinique qui peut être complété par l’échographie…

Dans sa forme aiguë, l’ombilic présente des signes d’inflammation avec des répercussions sur l’état général du veau : hyperthermie, abattement, anorexie… Dans sa forme chronique, l’ombilic est ferme et douloureux à la palpation et il y a peu de répercussion sur l’état général s’il n’y a pas de complications septicémiques associées à l’omphalite (arthrite, péricardite, méningite). Si l’examen à distance et la palpation de l’ombilic et de l’abdomen permettent d’identifier certaines omphalites et d’exclure une éventuelle hernie ombilicale, 50 % des omphalites internes ne peuvent être diagnostiquées que par échographie.

… avec une évolution variable suivant l’affection

Sur les omphalites externes, le pronostic est globalement bon. En revanche, les omphalites internes peuvent évoluer vers différentes pathologies :

  • une hépatite secondaire à une infection de la veine ombilicale avec la formation d’un ou de multiples abcès hépatiques. On observe souvent un retard de croissance et le pronostic est sombre.
  • une cystite secondaire à une infection de l’ouraque qui peut même conduire dans les cas extrêmes à une atteinte des reins.
  • une péritonite localisée, ou diffuse bien que moins fréquente, complication de l’omphalite intra-abdominale dont le pronostic est sombre. Une étude a montré que 60 % des péritonites sur des veaux étaient secondaire à une omphalo-phlébite.

Un traitement médical dans un premier temps, si besoin complété par la chirurgie

Il ne s’agit pas d’une urgence médicale mais la surveillance et la prise en charge précoce sont des éléments clés dans la gestion des omphalites et la prévention des complications. La précision du diagnostic est primordiale pour donner le meilleur pronostic, surtout dans le cas des atteintes des vestiges ombilicaux, et permet de mettre en place le traitement adéquat. Il passe par la prescription d’antibiotiques et d’anti-inflammatoires, parfois complété par la chirurgie. Si l’intervention ne présente pas de difficulté particulière, les complications à court, moyen et long terme peuvent survenir en fonction de ce qui a été observé lors de la chirurgie. Sur un abcès, l’exérèse permet le plus souvent de résoudre définitivement le problème. En revanche, le traitement d’une omphalo-phlébite peut nécessiter la marsupialisation de la veine (fixation à la paroi abdominale) avec un pronostic plus réservé. Les principales complications rencontrées sont l’abcès ou la déhiscence de la plaie, la péritonite, l’éventration et à plus long terme l’apparition d’une hernie.

Une pathologie multifactorielle et une prévention complexe

La prévalence des omphalites en élevage est dépendante de facteurs intrinsèques liés au veau nouveau-né (génétique, plus de problème sur les mâles, les veaux lourds ou nés de vêlage dystocique) et à ses conditions de naissances et de facteurs extrinsèques liés à l’environnement du vêlage et des premiers jours de vie. Les germes fréquemment retrouvés sont nombreux et non spécifiques (Escherichia coli, Streptococcus, Staphylococcus, Trueperella pyogenes, …). Ce sont principalement des bactéries que l’on retrouve dans l’environnement du box de vêlage. Les moyens de prévention permettent d’agir sur ces facteurs afin de limiter l’infection et la gravité de la maladie. Cela passe par :

  • une bonne gestion de l’environnement de mise bas, qu’elle soit assistée ou non : hygiène de l’éleveur et du vétérinaire, un box largement paillé avec une litière sèche, l’humidité retardant la cicatrisation du nombril.
  • conserver un cordon suffisamment long. Un cordon trop court est un facteur de risque majeur d’omphalite. Cela intervient plus souvent lors de présentation postérieure au vêlage ou en cas d’extraction trop rapide du veau.
  • la désinfection du cordon ombilical par trempage ou pulvérisation avec un produit adapté (chlorhexidine 2 à 5 %, teinture d’iode 7 %). Lors de cette opération, on veillera à intervenir avec des mains propres et du produit neuf.
  • distribuer du colostrum en quantité (10 à 15 % du poids vif dans les 24 premières heures, dont la moitié dans les 4 premières heures) et en qualité (pèse-colostrum ou réfractomètre). Même s’il semble ne pas y avoir de lien direct entre transfert immunitaire et omphalite, cela renforce l’immunité et prévient des septicémies.

Une gestion des omphalites qui rejoint la gestion globale de l’exploitation

Comme pour toutes les pathologies néonatales, la prévention des omphalites doit être intégrée dans une approche globale de la gestion des mises-bas. Cela commence dès le choix du taureau, en passant par les mesures alimentaires de préparation au vêlage ou de gestion du parasitisme afin de garantir le meilleur statut immunitaire possible et des mesures autour de la mise-bas : intervenir mais pas trop, respect de l’hygiène, désinfection systématique du nombril… Pour plus de renseignements, vous pouvez vous rapprocher de votre vétérinaire ou de nos services, ou consulter les articles sur notre site.

Dr Boris BOUBET

GDS Creuse

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